Chansonnier historique du XVIIIe siècle

La régence partie II


(J'ai gardé orthographe telle quelle)

 Les favoris du régent


Quel spectacle étonnant se présente à mes yeux !

Je vois le Régent de la France

Ne s'occuper que de bals et de danse

 

Et sans cesse avilir son rang et ses aïeux.

Cet esprit qu'on croyait sublime.

Dont les projets étaient si beaux

 

Pour nous donner le repos,

Va nous replonger dans l'abîme !

Il a pour se combler de gloire

Choisi d'illustres favoris,

Simonnet, (1) Noailles et Du Fargis ; (2)

C'est un beau trait pour son histoire.

 

Saint-Simon fier de son rang

Ne s'occupe que de son titre ;

Il est fripon, poltron, bélître.

Aussi sort-il d'un vilain sang.

Mais ici changeons de langage.

Je vais parler d'un demi-dieu.

Les héros de son nom sont connus en tous lieux

N'ont-ils pas sur le Ter (3) signalé leur courage ?

Ce digne rejeton d'une si noble race.

 

(1) Louis Rouvroy, duc de Saint-Simon, pair de France (1675-1755). Intimement lié avec Philippe d'Orléans, il fut nommé par lui membre du Conseil de régence. Les Mémoires qu'il nous a laissés forment l'un des plus curieux monuments de notre littérature historique. C'est un document précieux pour la seconde moitié du règne de Louis XIV et la Régence. Mais il faut le lire avec précaution, car l'historien se laisse souvent entraîner par son caractère haineux à des jugements peu équitables sur les hommes et les choses.

 

(2) Du Fargis, qui entre dans les plaisirs, est fils de Delrieu, ancien maître d'hôtel ordinaire du roi, et auparavant dans les affaires (M.). Il fut au nombre des roués du Régent, et son caractère lui valut le surnom de bon enfant.

 

(3) Le premier maréchal de Noailles avait battu les Espagnols commandés par le duc d'Escalonne au passage du Ter, petite rivière de la Catalogne. (27 mai 1694.)

  

Plein d'orgueil et de vanité,

Se croit plus de capacité

Qu'il n'en faut pour remplir sa place.

Ce ministre impudent déshonore son maître,

Il le baise amoureusement !

Judas baisa Jésus et ce fut autrement ;

Cependant celui-ci nous paraît aussi traître.

Je connais peu ce Du Fargis,

On nous dit qu'il est honnête homme j

Il n'est pas de l'ancienne Rome,

Il n'aurait point été d'Auguste favori.