Nous sommes en un temps où la science multiplie ses miracles. L'année dernière nous exposions, les admirables résultats obtenus par M. Édouard Belin (14) concernant la transmission électrique des photographies. Nous demandons aujourd'hui au même savant de nous dire les progrès de la vision à distance, cette extraordinaire découverte que ses travaux auront si brillamment contribué à réaliser.
J’ai entendu, à travers un fil électrique, les mots célèbres de Shakespeare : être ou ne pas être... c'est là ce qui m'arrête... »
Ainsi s'exprimait en 1876, sir William Thomson devant l'Association britannique. Et l’illustre savant, devenu plus tard lord Kelvin, continuait son rapport en disant : « J'ai aussi entendu des passages choisis au hasard dans les journaux de New York : « S.S. Cox est arrivé... La colonie « américaine à Londres a résolu de célébrer « le 4 juillet prochain ... » mais je ne parvins pas à bien débrouiller le « S. S. Cox ». Tout ceci, je l'entendis de mes propres oreilles avec une netteté qui ne laissait pas de place à l'erreur. Cette merveille, qui dépasse de loin toutes celles du télégraphe électrique, est due à un de nos compatriotes encore jeune, M. Graham Bell, devenu maintenant citoyen naturalisé des États-Unis. Comment ne pas admirer cette audace d'invention qui a imaginé des dispositions si simples !»
Voilà, que je sache, la première communication faite en Europe de ce petit appareil miraculeux considéré par tous, aujourd'hui, comme l'auxiliaire indispensable de notre vie moderne où tous les instants sont comptés. Les jeunes qui l'ont toujours connu considèrent volontiers le téléphone comme un bienfait naturel ; ils s'étonnent qu'on ait pu s'en passer et, hier encore, lorsqu'un incendie priva, les Parisiens du téléphone pendant quelques jours seulement, cet accident, aux brèves conséquences, apparut à tous comme une catastrophe susceptible de suspendre toute l'activité d'un grand pays.
Que de chemin parcourut en trente-trois années et quel étonnement si l'on songe aux difficultés que rencontra le téléphone pour entrer dans la pratique ! On le déclarait inutile et l'on hésitait à s'en servir !
Cet exemple peut être une leçon pour ceux qui doutent et un encouragement pour ceux qui cherchent. Quand le téléphone fut définitivement inventé, l'idée de sa réalisation hantait les esprits depuis une quarantaine d'années et je ne sais pourquoi l'on désespérait de résoudre cet autre problème parallèle, celui de la télévision, puisqu'on n'y songe pas encore depuis aussi longtemps, et si la science implacable démontre aujourd'hui l’impossibilité d'une solution parfaite, ne s'expose-t-elle pas à devoir demain changer d’opinion ? Il n'y a pas d'impossible absolu, il n'y a qu'un impossible relatif qui peut être l'aveu de notre ignorance momentanée.
Il n’y aura bientôt plus de distances !
Certes, le problème de la télévision n'est pas encore complètement résolu, mais il le sera, et cette solution est peut-être si proche que la question est presque d'actualité et mérite d'être connue.
Les journaux qui ont, précisément, pour mission de proclamer et de consacrer l'actualité, ont eu le tort (qui donc n'a jamais tort ?) de rapprocher la téléphotographie de la télévision et de dire qu'on parviendrait bientôt à la seconde puisqu'on possédait déjà la première. Je répète, comme je l'ai dit souvent, qu'il n'y a, entre ces deux choses, aucun rapport.
Télégraphier des photographies n'est pas photographier par le télégraphe, et la première étape réelle vers la télévision sera précisément atteinte lorsqu'on photographiera par le télégraphe et lorsqu'en plaçant un personnage devant un objectif, à Paris, on aura aussitôt son image visible à Berlin ou à Rome.
Cette première étape va être atteinte; c'est un fait que l'on peut considérer comme acquis.
Reste maintenant, pour faire de la télévision proprement dite, à obtenir dix à quinze épreuves successives en une seconde pour les projeter sur un écran et donner au spectateur de cette « télé cinématographe » L’illusion du mouvement, celle de la vie. Alors la combinaison du téléphone et de cet appareil nouveau permettra de voir et d'entendre ; les expressions de physionomie se joindront aux accents de la voix, il n'y aura plus de distances !
Malheureusement, un progrès aussi considérable ne s'accomplit pas en un jour et par le travail d'un seul. S'il en est un que la destinée a choisi pour apporter la solution parfaite, celui-là ne devra pas oublier tous ceux qui, longtemps avant lui, auront travaillé sans relâche, au prix d'efforts inouïs et de sacrifices énormes, pour échafauder et construire pierre par pierre cet édifice fantastique.
Je voudrais les citer tous ; mais ils sont trop nombreux. Et si la renommée a mis quelques noms en vedette, il faut penser à tous ceux, plus modestes et moins heureux qui ont disparu mais dont l'oeuvre est restée. Et maintenant encore, plus peut-être que jamais, aux quatre coins du monde, il y a des chercheurs hypnotisés par le problème de la télévision.
Pour mon compte, j'en connais un peu partout, et des plus humbles, qui sont tenaces et qui, sans espoir d'arriver, rêvent seulement d'avoir une toute petite part de collaboration.
Le sélénium, découvert, en 1817, par Berzelius (1), n'offrit pendant longtemps d'autre intérêt que celui d'ajouter un terme de plus à l'innombrable nomenclature chimique, et bien qu'en 1851, Von Hittorf (2) ait signalé ses propriétés électriques, aucune autre importance ne fût attachée à cette remarque. On prétend qu'en 1873, l’ingénieur américain, Willoughby Smith (3) recourut au sélénium pour quelques mesures de résistance des câbles sous-marins et qu'il chercha longuement d'où pouvait provenir l'erreur continuelle de ses mesures. Il s'aperçut enfin que ses indications variaient chaque fois que le barreau de sélénium se trouvait, soit éclairé, soit plongé dans l'obscurité, et il en conclut, chose bizarre, que la résistance électrique du sélénium variait avec l'intensité de la lumière qui le frappe.
Je ne sais si le fait est exact au point de vue strictement historique, mais, ce qui est Certain, c'est qu'à partir de ce moment, les propriétés nouvelles du sélénium furent connues, publiées, et qu'elles restèrent inexpliquées. On n'est d'ailleurs, encore aujourd'hui, pas beaucoup plus avancé, et si l'on se sert du sélénium avec une certaine audace, du moins ne peut-on, en aucune manière, expliquer la nature des phénomènes dont il est le siège.
Puisque le sélénium est, en quelque sorte, sensible à la lumière et puisque son rôle est de faire varier l'intensité du courant électrique, il doit être possible, par son moyen,de traduire les variations lumineuses en variations électriques et de transmettre ainsi, par le télégraphe, les impressions lumineuses.
Tel fut le raisonnement que se firent, dès 1873, quelques inventeurs toujours à la recherche du merveilleux. Leur enthousiasme fut, bien entendu, de très courte durée et, bien que l'histoire ne le dise pas, je croirais volontiers que le sélénium se chargea, à lui seul, de les désillusionner bien vite.
Cependant, trois ans plus tard, le téléphone faisait son apparition, et ce ne furent plus alors quelques chercheurs seulement, mais une foule d'inventeurs qui, surpris par la simplicité et la perfection du téléphone, en conclurent qu'il devait être aisé de faire pour la vue ce qu'on faisait si bien pour la parole, et que transmettre la vision devait être un jeu d'autant plus facile que la science disposait déjà du sélénium.
Un problème bien posé est souvent, dit-on, à moitié résolu, et si tant d'esprits, même éclairés, s'égarent dans des recherches qui sont condamnées d'avance, c'est que les inventeurs ne savent pas toujours et ne veulent pas même savoir exactement ce qu'ils cherchent. Il était aisé, certes, de jeter sur le papier quelques dessins schématiques et d'arriver ainsi à des conclusions merveilleuses en s'accordant comme un fait acquis toute une série de propriétés qui restaient à vérifier et que l'expérience n'avait pas démontrées. Il fallait aussi compter avec toutes sortes de phénomènes accessoires qui jouent dans le domaine télégraphique une influence quelquefois prépondérante et que de sérieux inventeurs contemporains semblent, quelquefois encore, négliger étrangement.
Bref, toute une série d'appareils destinés à la télévision furent proposés dans les quelques années qui suivirent l'invention du téléphone, et pour ne rappeler que les conceptions dignes d'un certain intérêt, je citerai particulièrement les noms de Carey(4), d’Adriano de Païva (5), du professeur italien Perosino(6), du D' Lichs (pas d’infos), de Ayrton(pas d’infos), et Perry (pas d’infos), etc.
Edison, bien entendu, fut donné comme ayant résolu le problème dès 1879, et il faut renoncer à citer toutes les nouvelles données de temps en temps par la presse et d'après lesquelles des savants américains auraient atteint le but depuis si longtemps convoité. Il est exact que cette question est très étudiée en Amérique, et il est très possible qu'elle y soit définitivement résolue, mais il faut bien avouer aussi que quelques informations de ce genre, en traversant l'Atlantique, prennent une importance à laquelle n'ont pas toujours songé ceux dont elles émanent.
Près de la réussite…
Après quelques années d'oubli pendant lesquelles on semblait avoir définitivement renoncé à transmettre la vue, la question fut remise à l'ordre du jour, en 1889, par l'instrument, fort ingénieux et très spécial, inventé par M. Lazare Weiller (7).
Cet appareil eut le même sort que ses prédécesseurs, mais certains détails de sa conception ont été utilement repris, soit pour la transmission, soit pour la réception, dans d'autres dispositions proposées par la suite.
Plus récemment enfin, il convient de citer les travaux précis de Dussaud (8) en France et de Senlecq (9), de M. Coblyn à Avignon (pas d’infos); de Szczepanik(10)en Autriche ; de Filippo Ré (pas d’infos), de von Bronk (pas d’infos) en Allemagne; de M. Armengaud (pas d’infos) à Paris; de Mottet (pas d’infos) en Suisse, et de tant d'autres encore.
On annonçait, il y a quelques jours seulement, que le problème de la télévision était, sinon résolu, du moins sur le point de l'être, grâce aux persévérantes recherches et aux remarquables résultats du savant allemand : M. Ernst Ruhmer (11). Je reviendrai plus loin sur ce dernier appareil, en indiquant d'autre part la série des travaux que j'ai moi-même poursuivis dans cette voie depuis quatorze années pour arriver bientôt je l'espère, à une solution qui permettra d'entrevoir le résultat définitif à brève échéance.
Tout appareil, quel qu'il soit destiné à la transmission d'un phénomène électrique, comporte forcément trois parties :
Au départ, un poste transmetteur ; A l'arrivée, un poste récepteur ; entre les deux, enfin, une ligne chargée de transmettre au second les impressions du premier. C'est cette ligne, si difficile à vaincre, que tant d'inventeurs omettent ou considèrent comme insignifiante. En télévision, le rôle du poste de transmission est, en quelque sorte, de voir l'objet celui du poste de réception est d’enregistrer l’image ou de la reproduire pour que d’autres puissent la voir.
Il faut donc, au départ, recourir à un agent sensible à la lumière et susceptible de revenir assez vite à son état primitif dès que cette même lumière a cessé d’exercer son influence. Il y a beaucoup de corps qui possèdent cette propriété, mais aucun n’atteint, dans ce sens, le degré de perfection du sélénium ; c’est pour cela que tous les systèmes anciens ou récents ont été obligés d’y avoir recours.
D’une façon générale, le transmetteur de la télévision est formé d’une chambre noire, analogue à celle des appareils photographiques. Un objectif forme l'image des objets visés, sur un plan que l'on suppose décomposé en un aussi grand nombre de points que possible et où sont placées les cellules sensibles au sélénium (chaque cellule correspondant à un point de l'image).
Dans certains appareils, on prévoit autant de cellules que de points dans l'image ; dans d'autres, au contraire, on suppose que la même cellule explore successivement tous les points, et dans d'autres encore, un nombre quelconque de cellules explorent l'image par fractions.
Si l'on envisage seulement une cellule prise au hasard, cette dernière est intercalée dans un circuit électrique alimenté par une pile et comprenant la ligne.
L'intensité du courant électrique dans ce circuit, sur cette ligne et à l'arrivée, varie, par principe même, comme l'intensité de la lumière qui frappe à chaque moment la cellule de sélénium.
Or, cette intensité lumineuse est précisément celle du point de l'image où se trouve la cellule. Si, donc, il y a autant de cellules que de points et si chacune d'elles est mise successivement en circuit sur la ligne, l'intensité du courant change continuellement et est chaque fois correspondante au point de l’image envisagée.
S'il n'y a, au contraire, qu'une seule cellule, le résultat est le même,mais sans recourir à un dispositif mécanique ou collecteur ayant pour but d'intercaler successivement sur la ligne chaque cellule en isolant toutes les autres.
À l'arrivée, l'image peut être produite, soit par une projection lumineuse fugitive sur un écran, soit par l'enregistrement durable du phénomène sur un support convenable. La première combinaison répond seule à la télévision proprement dite, puisqu'elle crée une image lumineuse dont les divers points sont visibles, au moment même où ils sont précisément explorés à l'autre poste.
Cette solution, si parfaite, semble aujourd’hui complètement irréalisable. La seule ambition que l'on puisse, je crois, légitimement avoir, est celle d'enregistrer l'image à l'arrivée, en un temps aussi court que possible, de manière à pouvoir la projeter sans retard.
Les qualités et les défauts du sélénium
Avant d'entrer dans l'examen rapide des divers systèmes actuellement proposés,il paraît logique et indispensable de savoir ce qu'est une cellule de sélénium et, malheureusement aussi quels en sont les défauts, afin de mieux apprécier les difficultés du problème et peut-être encore, l'imperfection momentanée de quelques systèmes.
On a proposé, depuis l'origine, de nombreux dispositifs pour la construction des cellules de sélénium et l'on a répandu des flots d'encre pour discuter sur le point de savoir quelle est exactement la nature des phénomènes auxquels nous assistons.
Jusqu'à ces dernières années, l'Allemagne s'était un peu spécialisée dans cette étude, mais la France a rattrapé le temps perdu, et je n'ai, nulle part, trouvé du sélénium aussi parfait qu'à Paris même.
Quant à la disposition de la cellule, le type le meilleur et qui est aujourd'hui presque universellement adopté, est celui qui fut proposé, en 1882, par Shelford-Bidwell (12).
Sur une plaque isolante sont enroulées, l'une dans l'autre, deux spires d'un fil métallique fin, de manière que deux spires voisines ne puissent pas se toucher et que l'extrémité de chaque fil constitue l'une des bornes du système. Sur un même côté de la plaquette, le sélénium est étendu et convenablement recuit de manière à relier les différentes spires par une espèce de pont que le courant électrique est obligé de traverser.
Puisque la résistance du sélénium varie sous l'action de la lumière, l'ensemble de la cellule joue en quelque sorte le rôle d'un robinet qui s'ouvrirait plus ou moins sous l'action de la lumière et permettrait un débit plus ou moins grand.
Malheureusement, le sélénium, cependant si miraculeux, a encore deux graves défauts et le plus grand d'entre eux, celui dont on a déjà tant parlé, est son inertie. Lorsque après avoir éclairé le sélénium, on le replonge dans l'obscurité, la résistance tend bien à revenir à sa valeur première, mais elle n'y revient pas de suite, et l'on ne saurait mieux fixer les idées qu'en comparant la cellule de sélénium à notre œil qui ne retrouve ses facultés absolues qu'assez lentement, lorsqu'il a été soumis à une intensité lumineuse puissante. On peut dire, en quelque sorte, que le sélénium est ébloui et qu'il y a persistance de l'impression lumineuse.
D'autre part, pour qu'une cellule de sélénium soit vraiment sensible, il faut qu'elle soit formée d'une couche infiniment mince ; elle devient, dès lors, extraordinairement résistante et rend presque négligeable l'intensité du courant dont on peut disposer sur la ligne télégraphique. Ces deux obstacles sont tels qu'ils ont été pour la plus grande part dans les échecs qu'ont successivement rencontrés tant d’expérimentateurs.
L'inertie s'oppose, presque radicalement, à l'emploi d'appareils ne comportant qu'une cellule et la résistance fait que si les transmetteurs sont sensibles et fonctionnent bien, les appareils récepteurs ne reçoivent plus eux-mêmes qu'une énergie incapable à les actionner.
Pour être réalisable, un appareil de télévision doit donc avoir un récepteur qui soit, à la fois, très sensible, très rapide et susceptible de produire des effets qui nécessitent le plus souvent une énergie très appréciable. J'ai, pour ma part, toujours considéré qu'il fallait recourir à un système multiplicateur, à ce que les télégraphistes appellent « un relais », capable de réagir sous une faible intensité du courant de ligne et d'actionner l'appareil récepteur par un courant beaucoup plus puissant, mais toujours proportionnel à cette dernière. C'est la solution de ces difficultés qui constitue un des points les plus intéressants de la méthode et de l'appareil que j'ai réalisés et que je proposerai bientôt sous le nom de télé graphoscope (13).
Quand il y a plusieurs cellules au poste transmetteur, chacune d'elles doit être successivement mise en circuit ; quand il n'y en a qu'une seule, cette dernière doit explorer le plan focal de l'objectif suivant un régime déterminé. Mais d'une façon générale et absolue, et quel que soit le dispositif adopté, l'image d'arrivée doit se former par une succession de points répartis suivant la même loi qu'au départ pour qu'un point déterminé (lu transmetteur correspond bien toujours au point homologue du récepteur.
Si, à ce poste, l'image doit être seulement formée par la projection fugitive de points lumineux assez rapprochés dans le temps pour que le premier soit, par persistance rétinienne, encore visible quand apparaîtrait le dernier, la solution tend à la télévision proprement dite, à la vue animée.
Un appareil qui coûterait six millions
M. Armengaud ( pas d’infos) a proposé, depuis deux ans, d'atteindre ce résultat par une disposition analogue à celle du récepteur de ma télé stéréographe (Édouard Belin 14), mais en répartissant les points lumineux à leur place convenable sur un écran, au lieu de les faire tous concourir en un emplacement unique. Tout récemment, M. Ruhmer ( pas d’infos) a donné le problème comme résolu en employant 10 000 galvanomètres sensibles, suffisamment précis. Voilà qui serait, semble-t-il, bien compliqué, bien encombrant et bien délicat à régler ! N'a-t-on même pas dit que cet appareil pratique coûterait six millions !
En tout cas, aucun des expérimentateurs qui parlent de transmettre la vue animée, n'a encore indiqué par quel moyen devait être vaincue la capacité de la ligue et comment 100 à 150 000 communications électriques passeraient successivement et sans mélange sur un fil réputé d'après les calculs les plus sévères, pour n'en pas supporter plus d'un millier, au maximum.
L'idée de la télé graphoscope (13). est toute différente. L'image sera formée sur une feuille de papier quelconque ; elle sera durable, inaltérable même et l'on pourra, à volonté, soit la projeter, soit la multiplier en épreuves positives, sans recourir cependant à aucun procédé photochimique. L'enregistrement des impressions successives sera fait par la perforation de petits trous équidistants, mais de diamètre directement ou inversement proportionnel au point de l'image de départ dont chaque point de l'image d'arrivée sera la figure. Ce sera, en somme, de la similigravure. Cette perforation sera faite, soit par voie électrique, d'après l'idée émise il y a quelques années par le Dr André Bing, soit par voie mécanique à l'aide d'une aiguille fixée sur une lame ou une membrane commandée par un électro-aimant comme dans le téléphone.
Cette affirmation, basée non seulement sur une conviction d'inventeur, mais sur un fait acquis, a été vérifiée par des expériences de laboratoire et de pratique.
Le 27 et le 28 février 1905, je suis parvenu à reproduire par des trous de diamètre variable, les différences d'éclat d'un point lumineux placé à 480 kilomètres du poste d'arrivée. Les deux appareils élémentaires étaient à Paris, mais ils étaient reliés par une ligue réelle mise à ma disposition par l’administration des Postes et Télégraphes et qui partait de l'hôtel de Gutenberg pour y revenir après avoir passé par Le Havre. Cette expérience, réalisée en présence de mon frère et du Dr Bing qui furent mes collaborateurs du début ainsi que de quelques amis et ingénieurs, n'avait d'autre but que de vérifier et de confirmer le principe de l'appareil que j'avais depuis si longtemps rêvé et qui devait, pour exister enfin, me demander tant de patience encore. Mais il est aujourd'hui à peu près terminé; il semble pleinement répondre à mon attente et je suis heureux d'en parler la première fois, moi-même, aux lecteurs de je sais tout.
Sans doute, l'avenir nous réserve-t-il, dans ce domaine, de grandes surprises que l'on ne saurait aujourd'hui prévoir, mais les succès inespérés dont la science nous donne le spectacle depuis quelques années n'autorisent plus aucun doute.
Pour arriver, il faut vouloir et la persévérance, la patience, la ténacité même, doivent être, au mépris de tous les déboires et de toutes les railleries, les qualités primordiales du véritable chercheur.
L'inventeur ne travaille pas seulement pour soi-même, il travaille aussi pour son pays, pour l'humanité et cette idée restera toujours son meilleur encouragement.
ÉDOUARD BELIN (14)
(1)
Jöns Jacob Berzelius savant suédois, est considéré, avec Antoine Lavoisier, John Dalton et Robert Boyle, comme le fondateur de la chimie moderne.
(cliquez sur chaque titre)
(2)
Johann Wilhelm Hittorf était un Allemand physicien et chimiste .
(3)
Willoughby Smith était un Anglais ingénieur électricien qui a découvert la photoconductivité de l'élément sélénium . Cette découverte a conduit à l'invention de cellules photo - électriques , y compris ceux utilisés dans les systèmes de télévision premières.
(4)
George R. Carey
Il est employé au bureau de surveillance de l'Hôtel de ville de Boston.
Il est parmi les premiers à avoir imaginé la télévision dans les années 1870-80 et notamment de « caméra électrique au sélénium » (qui exploite les propriétés photo-électrique/photoconductivité du sélénium comme un moyen pour transmettre des images) et du premier récepteur « télectroscope ».
Il est en concurrence avec d'autres inventeurs tel que Adriano de Paiva, Constantin Senlecq ou Jan Szczepanik ...
(5)
Adriano de Paiva (1847-1907) est un inventeur portugais pionnier de la télévision.
(6)
Carlo Mario Perosino, Professeur de physique au lycée royal de Mondovi (Piémont), est la première contribution italienne connue à la préhistoire de la télévision.
(7)
Lazare Weiller a marqué l'histoire de la télévision tel un météore. Il signe un seul article sur le sujet, en 1889, mais cet article - à l'égal de celui de l'Allemand Paul Nipkow, publié en 1885 - marque les développements de la télévision jusqu'au début des années 1930.
(8)
François Dussaud, l'un des meilleurs physiciens de sa génération, dans son laboratoire de physiologie de la Sorbonne (Photographie Historia, mai 1969). A l'âge de vingt-trois ans, le physicien suisse, docteur ès sciences, était déjà titulaire de la chaire de physique et de chimie à l'Ecole de Mécanique et à la Faculté des Sciences de Genève. Ses recherches dans les domaines de l'enregistrement électrique et de la synchronisation du son et de l'image cinématographique lui vaudront la reconnaissance des milieux scientifiques de l'époque.
(9)
Constantin Senlecq. Il est principalement connu pour une de ses inventions, le télectroscope : un appareil capable d'analyser, de transporter et de reconstituer une image. Une invention sur laquelle travaillait également en parallèle l'inventeur américain Georges R. Carey et qui est pour beaucoup une première base de l'invention de la télévision.
(10)
Jan Szczepanik est une figure oubliée de l'histoire de la télévision. Certains témoignages, dont celui de Mark Twain, lui attribue cependant le crédit d'avoir été le premier à avoir réussi une transmission d'image à distance, dès 1898. L'affaire est controversée dès 1898 et les historiens de la télévision (Abramson, Urvalov, Burns,...) ont généralement affirmé leur scepticisme, voir crié à la mystification. Une biographie de Szczepanik par l'historien du cinéma polonais W. Jewsiewicki existe, mais il ne nous a pas encore été possible de nous la procurer. La présente page est donc provisoire. Toute contribution permettant de l'améliorer sera la bienvenue.
(11)
Ernst Walter Ruhmer (* 15. Avril 1878 à Berlin , † 8. Avril 1913 ) était un physicien et pionnier allemand de la technologie de fréquence porteuse.
(12)
Shelford Bidwell (1848-1909) était un physicien et inventeur anglais
(13)
Un Graphoscope était un appareil du 19e siècle utilisé dans les salons afin d'améliorer la visualisation des photos et du texte. Ces articles de nouveauté consistait en une seule loupe , souvent dans un cadre en bois, dans une construction globale qui pourrait sombrer dans une forme rectangulaire compact. Un support photo / carte a été généralement aussi inclus. Un KOMBI appareil avait souvent inclus sa conception un Graphoscope pour une meilleure visualisation du film. De nombreux dispositifs ont combiné un stéréoscope et Graphoscope.
(14)
Édouard Belin, est un ingénieur français, inventeur du bélinographe, système de transmission à distance des photographies en usage dans la presse des années 1930 à son remplacement par la transmission de fichiers numériques cinquante ans plus tard.
La société Édouard Belin, installée à Rueil-Malmaison, a produit des appareillages techniques et de laboratoire.