Qu'ai-je entendu ? L’on dit qu'une comète
Va nous porter enfin le coup mortel ;
Pauvres pécheurs, il faut que l'on se mette
Vite en état de marcher droit au ciel.
Vous que parfois la conscience oppresse,
Repentez-vous, bientôt Dieu jugera :
Ouvre tes bras, ma gentille maîtresse,
La mort viendra
Sitôt qu'elle voudra.
D'où vient, mortels, votre air de pénitence,
A vos regrets qui peut donner l'éveil ?
Que fut pour vous cette frêle existence ?
Beaucoup d’orages et si peu de soleil ;
L'amour lui seul, d'une simple caresse,
Dota la vie et la vie enivra
Ouvre tes bras, ma gentille maîtresse,
La mort viendra
Sitôt qu'elle voudra.
Ces plats valet, à qui tout météore
Semble un despote orgueilleux de ses droits,
Jusque au sol vont abaisser encore
Leur front souillé de la bave des rois.
Du feu vengeur, vos cris, votre bassesse,
Vils courtisans, rien ne vous sauvera
Ouvre tes bras, ma gentille maîtresse,
La mort viendra
Sitôt qu'elle voudra.
Ces potentats, ces chefs de vingt royaumes,
Qui font toujours moins de bien que de bruit,
Ne sont-ils pas comme nous des atomes
Qu'un souffle élève et qu'un souffle détruit.
Ils vont pousser des hourras de détresse,
Quand de leurs mains le sceptre glissera
Ouvre tes bras, ma gentille maîtresse,
La mort viendra
Sitôt qu'elle voudra.
Créé d'un mot, d'un mot réduit en poudre,
Ce globe errant dans la vague des airs,
Grâce à Franklin, brava longtemps la foudre,
Mais l'axe plie, adieu tout l'univers.
Compas en main, plus d'un savant s'empresse,
A calculer le jour on tout mourra
Ouvre tes bras, ma gentille maîtresse,
La mort viendra
Sitôt qu'elle voudra.
D'un tel malheur sans rechercher les causes,
Sans afficher des regrets toujours vains,
Enivrons-nous du parfum de nos roses,
Enivrons-nous du bouquet de nos vins.
Que l'or chez nous paraisse et disparaisse,
Puisqu'une obole à Caron suffira
Ouvre tes bras, ma gentille maîtresse,
La mort viendra
Sitôt qu'elle voudra.
Trop est destroiz, qui est desconfortés
De cele en qui il a tout son cuer mis,
Et g'en ai tant soufert et enduré
Paine et travaux come loiaus amis ;
Et sachiés bien ja ne m'en retraierai ;
Ainz serviray à mon pooir touz dis,
Tant que j'aurai vers ma dame trové
Aucun confort des maus où il m'a mis.
Li desconfors m'a si désespéré
Que je ne sai que puisse devenir;
Mès un espoir m'a si réconforté
Que, il li doit de mes maus souvenir :
Et tant me fi en sa grant loiauté
Ja por autre ne me devra guerpir,
Quant il saura con je li ai esté,
Fins et verais, cortois sans repentir.
Se loiauté me voloit avancier,
Bien porroie de légier soustenir
Ma grant dolour, et mes maus alégier
Que bone amor me fait por li soufrir :
Touzjours serai et sui en son dangier,
Et sachiès bien ja ne m'en quier partir,
Por ce li pri qu'ele mi veuille aidier,
Qu'en desespoir ne me face morir.
Celle mi nuist qui m'y devroit aidier,
Et si ne daigne avoir de moi merci,
Ne nule riens ne mi puet alégier
Se cele non qui si me tient saisi
Que ne me puis ne ne sai conseiIlier,
Ainz en remaing dolens et esbahi.
Puisqu'el me veut en tel dolor Iaissier,
Melz me vendroit la mort que vuist ensi.
Un seul confort me tient en bon espoir,
Et c'est de ce c'onques ne la guerpi,
Servie l'ai touzjors à mon pooir
N'one vers autre n'oi pensé fors qu'à li.
Et à tout ce me met à non chaloir,
Et si sai bien ne l'ai pas déservi :
Si me convient atendre son voloir
Et atendrai comme loyal ami.
La brigantine
Qui va tourner,
Roule et s'incline
Pour m'entraîner.
0 Vierge Marie,
Pour moi priez Dieu !
Adieu, patrie ! (bis)
Provence, adieu ! (bis)
Mon pauvre père
Verra souvent
Pâlir ma mère
Au bruit du vent.
0 Vierge Marie,
Pour moi priez Dieu !
Adieu, patrie ! (bis)
Mon père, adieu ! (bis)
Ma sœur se lève
Et dit déjà :
« J'ai fait un rêve,
« Il reviendra. »
0 Vierge Marie,
Pour moi priez Dieu !
Adieu, patrie ! (bis)
Ma sœur, adieu ! (bis)
La vieille Hélène
Se confiera
Dans sa neuvaine
Et dormira.
0 vierge .Marie,
Pour moi priez Dieu !
Adieu, patrie, (bis)
Hélène, adieu ! (bis)
De mon Isaure
Le mouchoir blanc
S'agite encore
En m'appelant.
0 Vierge Marie,
Pour moi priez Dieu !
Adieu, patries ! (bis)
Isaure, adieu ! (bis)
Brise ennemie,
Pourquoi souffler
Quand mon amie
Veut me parler ?
0 Vierge Marie,
Pour moi priez Dieu !
Adieu, patrie ! (bis)
Bonheur, adieu ! (bis)
Était fils de Pierre Mauclerc, si fameux sous le règne de Philippe-Auguste; il épousa Blanche, fille de Thibault, roi de Navarre; il était comte souverain de Bretagne. Gace Brulé, poète célèbre de cette époque, qu'il avait attiré à sa cour, lui donna le goût de la poésie. Le comte de Bretagne a composé des chansons qui ne sont peut-être pas inférieures en mérite à celles du comte de Champagne, qu'il paraît avoir pris pour modèle. Il survécut plus de trente ans à ce prince.
Bernart, à vous vueil demander
De deus choses la plus vaillant,
Proece que tant oi loer,
Ou largece qu'on aime tant.
Si m'en dites vostre semblant ;
Car j'ai touz jors oi couter,
Sans proece ne puet monter
Nul chevalier très bien avant
Qui d'armes soit entremétant.
Cuens de Bretaigne, sans fausser,
Largèce vault melz, ce m'est vis :
Que largece fait homme amer
A trestouz ceus de son pays ;
Méesmement ses anemis
Puet-on conquerre par doner :
Et si en puet-on acheter
L'amor au roy de paradis ;
Et qui l'a, muIt li est bien pris.
Bernart de la Ferté, amis,
Ne cuit sanz proece vaille
Largece ; ainçois m'est avis
Qu'en semble feu de paille :
Quant est ars, bien sé sanz faille
Riens ne vaut; pour ce m'est avis
Proece doit avoir le pris ;
Car qui l'a, ne fera faille
En nul besoing où il aille.
Cuens, et je di sans largece
Ne porroit nus estre preudon :
Car à toz hiens fere adrece
Celui qui l'a en sa méson.
Et meesmement riches hon
Qui de doner n'a paréce,
Si ne le fet par détrèce,
Itel doit avoir région ;
Et non mie le preus félon.
Bernart, j'ai touz jors oi dire
Que li cors gaaigne l'avoir ;
Et se il est mauvès sire
Quel chose le fera valoir ?
Largece n'ia povoir.
Ne fisicien ne mire.
Touz jors sera de l'empire
Mis à henor en non chaloir,
Ce poez-vous savoir de voir.
J’ai couru tous ces bocages,
Ces prés, ces monts, ces rivages
Mais je n’ai trouvé pourtant
Celle que j’ai poursuivie :
Hélas ! qui me l’a ravie,
La nymphe que j’aimais tant ?
Pastourelles joliettes,
Qui de vos voix déliettes,
Vos ardeurs allez chantant,
Selon qu’amour vous convie,
Dites, qui me l’a ravie ;
La nymphe que j’aimais tant ?
Ah ! c’en est fait, c’est fait d’elle :
Un dieu, la voyant si belle,
Parmi ces bois l’écartant,
Épris d’amoureuse envie,
Au ciel me l’aura ravie,
La nymphe que j’aimais tant ?
Adieu, forêts désolées ;
Adieu, monts, adieu, vallées ;
Adieu, je vous vais quittant :
Puis-je plus rester en vie,
Puisque l’on me le ravie,
La nymphe que j’aimais tant ?