CAPPIELLO LEONETTO (1875-1942)
Article écrit par Marc THIVOLET
Né à Livourne en 1875, Leonetto Cappiello peint des toiles prometteuses dès l'âge de quatorze ans. Sa première œuvre connue est une vue du port de Livourne. Il peindra également un certain nombre de portraits en pied sous l'influence des Macchiaioli, groupe de peintres toscans sensibles aux théories impressionnistes.
En 1896, il remplit un album — La Lanterna magica — de ses premières caricatures. Dans ce domaine aussi il s'inscrit dans l'esprit toscan. La région avait connu pendant les années cinquante une école de caricaturistes qui se réunissaient dans un café, le Michel-Angelo. Dans cette série se manifeste, comme dans ses toiles, un goût pour le portrait en pied. Cappiello montre un plaisir évident à saisir ses personnages de profil, d'un trait continu.
En 1898, il se rend à Paris pour un séjour d'« au moins un mois ». Il ne quittera cette ville que pour se retirer à Grasse où il mourra en 1942. Le frère de Cappiello travaillait à la Bourse. L'artiste trouva donc tout naturellement dans la salle des cours du palais Brongniart les sujets de ses premières caricatures parisiennes. Il rencontre Puccini qu'il avait connu à Livourne et qui se trouve à Paris à l'occasion des représentations de La Vie de Bohème. Il propose alors à son illustre compatriote de faire son portrait-charge ainsi que celui de Novelli, illustre acteur italien qui faisait un triomphe au théâtre de la Renaissance. Le portrait-charge était alors considéré comme une marque de consécration par les artistes qui y voyaient la confirmation de leur popularité. Les deux caricatures parurent dans Le Rire du 2 juillet 1898. Cappiello fit très rapidement partie de l'équipe de cette illustre publication qui comptait déjà parmi ses membres : Léandre, Willette, Abel Faivre. Cappiello va désormais hanter les coulisses des théâtres où se produisent Sarah Bernhardt, Réjane, Mounet-Sully, Marguerite Moreno... Cette même année 1898 sort son album, Nos Actrices. Cette tendance à l'arabesque dans laquelle Cappiello verra le secret de l'affiche réussie se manifeste déjà dans certaines de ses caricatures, et c'est un grand talent qui commence à s'affirmer dans les portraits-charges de la Belle Otero (1898), puis de la chanteuse Polaire (1900), de Sarah Bernhardt (1903). Collaborateur de Frou-Frou, il est amené à réaliser pour ce journal plutôt léger sa première affiche. Il abandonnera peu à peu la caricature pour se consacrer presque exclusivement à cette forme d'expression où il va rapidement s'imposer comme un maître. Au début, ses silhouettes féminines sont proches de celles de Chéret, mais, en quelques semaines, il crée un style profondément original. Ses personnages sont emportés par un mouvement « en arabesque » et se détachent sur un fond sombre. Thermogène engendre la chaleur (1907) demeure l'une des créations les plus populaires de l'affiche ; cette image sera utilisée jusqu'à la fin des années quarante. Cappiello est le premier artiste publicitaire qui définit les grandes règles de l'art de l'affiche. Déjà, Bitter Campari (1921) préfigure les affiches que Willemot réalisera pour Orangina. Persuadé que la première obligation de l'affiche est de surprendre, il n'hésite pas à proposer des images qui n'ont pas de rapport direct avec le produit vanté : tel est le cas de l'amazone et de sa monture réalisées pour le Chocolat Klaus (1907). Cappiello, de son propre aveu, recherche la surprise, la dissonance comme moyen de briser l'uniformité des murs.
L'art de Cappiello évoluera et tiendra compte, dans une certaine mesure, des nouveaux courants qui traversent l'univers de l'affiche. La monumentalité de sa composition pour le Bouillon Kub (1931), les personnages en gros plan du Petit Dauphinois (1933) et de l'Œuvre (1934) montrent que Cappiello prend acte de l'influence que Cassandre exerce alors sur l'affiche.
Cappiello réalisera également des projets de décors, en particulier pour des ballets qui, par suite de circonstances malheureuses, ne verront jamais le jour. Il s'est également efforcé de renouer avec la peinture, sans jamais pouvoir retrouver l'inspiration de ses premières œuvres.
Source : universalis 2011
BIOGRAPHIE :
1875
Naissance de Leonetto Cappiello à Livourne. Son père est liquidateur maritime.
1886
Premières peintures : un portrait d'homme et un portrait de femme (non localisés). Il poursuit sa scolarité à Livourne; ses cahiers d'écolier sont remplis de croquis. Il commence à copier des gravures anciennes.
1892
Sans fréquenter d'école des Beaux-Arts ou un atelier particulier, Cappiello connaît la plupart des peintres exerçant alors à Livourne ou en Toscane. Il expose pour la première fois à Florence une grande toile : Scène d'intérieur ( Livourne, Musée Municipal G. Fattori).
1896
Premier album de caricatures : Lanterna Magica.
Illustre un carnet de bal (perdu).
1898
Printemps : Cappiello arrive à Paris où il vient voir son frère qui travaille à la bourse.
Bref retour à Livourne pour la mort de son père.
Juin : retour à Paris où il rencontre Puccini et l'acteur Novelli.
Juillet : parution de ses deux premières caricatures dans Le Rire : Puccini et Novelli. Début de la série Les Contemporaines dans Le Rire.
Cappiello s'installe définitivement à Paris.
Première caricature de Réjane en couverture du Rire. Premières caricatures dans Le Cri de Paris (Polin, Polaire...).
1899
Premiers dessins dans La Rampe et dans Le Sourire.
Statuettes caricaturales : Yvette Guilbert, Jeanne Granier, Réjane.
Fin mai ou début juin : Nos Actrices, album de portraits de caractères édité par la Revue Blanche.
Première affiche pour Le Frou-Frou.
Il fait la connaissance de Toulouse-Lautrec.
1900
Premiers dessins dans Le Journal (Sarah Bernhardt dans "L'Aiglon").
En novembre il signe son premier contrat avec l'imprimeur-éditeur P. Vercasson, qui marque le début de sa carière d'affichiste.
Deux affiches surtout le font connaître : Le Cachou Lajaunie et Les Amandines de Provence.
1901
Premiers dessins dans Le Figaro. Deux caricatures dans L'Assiette au Beurre.
Novembre: mariage avec Suzanne Meyer.
Importante activité d'affichiste : Corset le Furet, Odette Dulac, La Marquisette...
1902
Affiches : Retour de Réjane dans "La Passerelle", Louise Balthy aux Folies Bergères.
Naissance d'une fille, Françoise.
28 novembre : Gens du Monde, n° spécial de L'Assiette au Beurre.
1903
Avril : Le Théâtre de Cappiello, n° spécial de la Revue Le Théâtre.
Il crée l'affiche pour le Chocolat Klaus, véritable révolution dans l'art publicitaire, puis Katabéxine, Le P'tit Jeune Homme.
1904
Janvier : Les Contemporains célèbres, première série, Album publicitaire de la firme Lefèvre-Utile, illustré de 18 caricatures de Cappiello.
Cappiello abandonne presque totalement la caricature pour se consacrer essentiellement à l'affiche.
Affiches pour Le Friquet, Xerès Pedro Domecq, Nouilles Ferrari.
1905
70 dessins de Cappiello, recueil de caricatures de presse parues antérieurement, édité par H. Floury.
Portraits d'Albert Emile Sorel et de Mme Lucien Muhlfeld.
Affiches pour l'Anis Infernal, Portofino-Kulm, Bijoux Colin, Fleur des Neiges.
1906
Nombreuses affiches : Menthe-Pastille, Esperantine, Pneu Continental, Torrilhon.
1907
Décoration de la villa de Louis Dreyfus à Saint-Germain-en-Laye.
Naissance d'un fils Jean.
Nombreux portraits.
Affiches importantes : Angélus, Triple Sec Fournier, Maurin-Quina et surtout le célèbre Thermogène.
Il expose sa théorie de l'affiche dans Publicité Moderne.
1908
Expose au Salon de la Comédie Humaine le portrait de Paul Adam, son beau-frère.
Membre du Comité d'organisation du 2ème Salon des Humoristes où il expose.
Affiches pour la Source Parot, Xerès Quina Ruiz, Cognac Albert Robin.
1909
Expose à la Société Nationale des Beaux-Arts le Portrait de sa femme et de ses deux enfants (Musée de Livourne), puis au Salon des Humoristes.
Affiches pour Pippermint, Fernet-Branca, nombreuses affiches éditées par Vercasson en Amérique du Sud.
1910
Expose à la Société Nationale des Beaux-Arts le portrait d'Henri de Régnier (musée d'Orsay).
Affiche célèbre pour Cinzano.
1911
Nouveau contrat avec Vercasson.
Il fait un grand nombre d'affiches : Vittel Grande Source, Longines, Oxo, Florio et surtout le célèbre chocolat Poulain.
1912
Décore le salon de thé, le salon de lecture et le fumoir des Galeries La Fayette.
Nombreuse affiches : Marie Brizard, Le Nil, Bière du Fort-Carré, Sacha Guitry Jean III.
1913
Nombreuse affiches : Villiod, Cigarettes Bastos, Lampe Visseaux, Chaussures Unic.
1914
Mai : reçoit la Légion d'honneur.
Rappelé en Italie pendant la guerre, il y fait fonction d'interprète au Service de l'information.
Quelques affiches : Exposition Internationale de Lyon, l'Eclair.
1915
Publie quelques eaux-fortes sur la guerre et collabore à La Baïonnette, au Rire et à Fontasio.
1916
Couverture de l'édition originale du Poète Assassiné d'Apollinaire.Quelques affiches : Le Trait-d'Union franco-italien, Thermo-Bloc.
1919
Début de sa collaboration avec Devambez.
Quelques affiches : L'Avenir, Poudre de Luzy.
1920
De nouveau membre du Comité du Salon des Humoristes.
Expose au 1er Salon de la Publicité et à Beauvais au Salon de l'Affiche.Nombreuse affiches : en particulier Les Blanchisseries franco-américaines, Mistinguett, Robur, Cachou Lajaunie.
1921
Décoration d'une épicerie rue Jean Goujon.
Promu officier de la Légion d'Honneur.
Gagne un procès contre la maison Chocolat Poulain qui a partiellement reproduit son affiche en la modifiant.
Nombreuse affiches pour la France et l'Italie, Bitter Campari, Café Martin, Imperméables Pirelli.
En novembre 1921, il signe un contrat d'exclusivité avec Devambez, seul concessionnaire des Nouvelles Affiches Cappiello.
1922
Expose à la Biennale de Venise et à l'Institut français à New-York des maquettes d'affiches.
Trés nombreuses affiches en France et en Italie : Exposition Coloniale de Marseille, Parapluies Revel, Restaurant Poccardi.
1923
Février-mars : exposition particulière chez Devambez de l'ensemble de son oeuvre.
Affiches pour l'ouverture du Théâtre de l'Etoile, Pâtes Ferrand-Renaud, Royat.
1924
Affiches pour la France, l'Italie et l'Espagne : Ricqlès, Café con leche Iberia, Bal de la couture parisienne.
1925
Affiches pour Peugeot, Tana, Bisotti Wamar, l'Electrification, Studebaker.
1926
Affiches pour les cigarettes Louis Doize, l'eau des Abatilles, La Baule.
1927
Affiches pour les cigarettes Laurens, Lane Borgesesia.
1928
Projets de décors et de costumes de ballets, d'abord pour Sacha Guitry, puis pour Leonide Massine.
Autoportrait commandé par la Galerie des Offices de Florence.
Affiches pour L'Ami du Peuple, Becuwe.
1929
Affiches importantes notamment pour Savora.
1930
Naturalisé français.
Cartons de tapisseries pour la Manufacture Nationale de Beauvais sur le thème des perroquets. Illustre La Princesse de Babylone de Voltaire. Affiches importantes pour O Cap, Le Cuir qui marquent une évolution dans son art de l'affiche.
1931
Expose ses tapisseries des Perroquets réalisées par la Manufacture Nationale de Beauvais, à l'Exposition Coloniale.
Affiche trés importante pour le Bouillon Kub.
1932
Expose au Salon des Humoristes dont il fait l'affiche.
Affiches pour Dubonnet, Marianne.
1933
Affiches pour le beurre Gautier, la France de Bordeaux.
1934
Affiches importantes pour Bally, l'Oeuvre, le Lorrain.
1935
Décoration à fresque du bar du restaurant Dupont, boulevard Barbès. Expose au Salon des Humoristes, participe au Salon de l'Enseigne.
1936
Participe à la Triennale de Milan et à l'Exposition de l'Affiche française à Prague.
1937
La Force Motrice, décor du Pavillon de la Publicité à l'Exposition de 1937. Cappiello y est Vice-Président de la classe de publicité.
Affiches pour l'Exposition Paris 1937 et l'Accueil de la France.
1938
Expose au Salon de la Société Nationale des Beaux-Arts une grande toile, Les Dormeuses (Musée des Beaux-Arts de Lyon).
Quelques affiches : Mossant, Semaine de l'enfance.
1939
Participe à l'Exposition de l'Affiche en couleurs de Chéret à nos jours, au Conservatoire des Arts et Métiers.
1941
Malade, il se retire à Grasse, chez sa belle-soeur, Mme Lucien Muhlfeld. Séries d'illustrations des poèmes de Rimbaud (inédit).
1942
2 février : Mort de Cappiello à Cannes à la suite d'un dîner en compagnie de son ami André Rouveyre.
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